Jocelyne Outrequin
Si Jocelyne Outrequin a une formation académique, agrégation d’arts plastiques, son atelier est pour elle comme un laboratoire où elle aime expérimenter les matières, les couleurs au gré des humeurs.
La Galerie, mer oblige, présente son travail sur les poissons, (bars, rougets, dorades, sardines…) utilisant la technique du Gyotaku, en français « Ichtyogramme »., ainsi que ses photographies d’huîtres.
Le Gyotaku est une technique picturale japonaise qui consiste à reproduire l’empreinte de poissons le plus fidèlement possible.Cette technique remonte à plus de 1.500 ans et elle était utilisée par les pêcheurs pour immortaliser leurs plus belles prises. Elle permettait d’obtenir un motif inversé, une véritable empreinte de poisson, souvenir et preuve de leur pêche. Sur leurs œuvres les pêcheurs japonais écrivaient également le nom du poisson, les mensurations, le lieu et la date de la capture. Ils y ajoutaient parfois un poème de remerciement à la mer nourricière avant d’apposer leur signature. Dans cet élan artistique le pêcheur exprimait, au-delà de la volonté de fixer la mémoire humaine ainsi que sa satisfaction et sa fierté d’avoir pris une pièce d’exception, sa reconnaissance pour la générosité des océans.Le gyotaku était affiché dans les poissonneries, consacrant ainsi le trophée. Jocelyne Outrequin réalise cette empreinte à l’encre de chine sur un papier japonais appelé « washi ». Le washi est un papier fabriqué à partir de fibres de mûrier sauvage entrelacées, ce qui lui confère tout à la fois une grande résistance et une souplesse particulière. Clin d’œil aux gyotakus ancestraux, elle signe ses œuvres avec un tampon provenant du Japon et a donné des noms à sa série des Sardines : Emmeline, Pauline, Céline, Evelyne, Roselyne, Marine…
La Galerie présente également le travail de Jocelyne Outrequin sur les huîtres qu’elle photographie en plan rapproché, en macro, ce qui en soit peut paraître déjà étrange. Et le résultat est très surprenant…Lors de la prise de vue elle va sélectionner un détail pour le retravailler. Plusieurs critères la guident. Elle choisit ce détail :
pour ses qualités graphiques – sa composition, ses contrastes, ses transparences –
pour sa puissance évocatrice – paysage de bord de mer, plage, vague, écume, ou voilage, linge, dentelle
pour ce qu’il renferme tel une matrice – limbes, plante en devenir, foetus, chrysalide –
pour son aspect fantomatique, énigmatique, liquide, amniotique.
Une fois ce détail sélectionné, Jocelyne Outrequin joue avec la couleur du cliché jusque’à lui donner un aspect radiographique aux transparences aquatiques. Plus rien ne laisse deviner l’objet de la prise de vue, l’huître et c’est tout un univers qui se déploie, laissant place à l’imaginaire de chacun. Apparaissent des paysages lunaires, des dentelles humides, des compositions abstraites et diaphanes dont la photographie, par le recadrage, garde la trace.